Les Albums du Père Castor : 8 générations de lecteurs

Roule-galette, petit Poisson d’Or, Mischka , Poule Rousse, Pauv’Coco,… Nombreux sont les albums du Père Castor qui émerveillent encore de nos jours les yeux des plus jeunes, et réveillent de vibrants souvenirs des premières lectures des plus grands !

Paul Faucher, un libraire devenu éditeur, naissance de la littérature jeunesse

Créée au début des années 1930, au sein des éditions Flammarion, la collection des Albums du Père Castor était composée des livres illustrés pour les enfants qui font partie des premiers ouvrages à s’adresser directement aux enfants, dans un souci éducatif, avec notamment pour choix principal des images de qualité, réalisées par des artistes et célébrant souvent la poésie de la nature. Ils ont marqué durablement le paysage du livre jeunesse.

A côté des récits illustrés, dont certains sont devenus des « classiques » toujours en librairie, les albums du Père Castor ont eu d’autres facettes beaucoup moins connues, comme celle des livres-jeux ou livres d’activité (découpage, pliage). Des pionniers au regard des préceptes pédagogiques de l’époque.

L’Éducation Nouvelle en 1950...

Derrière ce projet éditorial,pédagogique et esthétique que sont ces albums, Paul Faucher (1898-1967) – libraire de la maison Flammarion devenu éditeur, a adhéré très tôt au mouvement de l’ Éducation Nouvelle. Cette nouvelle pédagogie cherche a réléver chez les enfants leur capacité créatrice et leur sens de l’Art profond et inné ches tout jeune humain. Il créera en 1946 un centre de recherche biblio-pédagogique intitulé « l’Atelier du Père Castor » et ira jusqu’à ouvrir une école « École du Père Castor » (Bvd St Michel à Paris) en 1947. Paul Faucher (PF) va travailler en permanence en interaction avec les enfants.

Origines des Albums du Père Castor

Paul Faucher était tellement impliqué dans la mouvance de cette Éducation Nouvelle , qu’il devint président du Groupe Français de l’Éducation Nouvelle en 1935, en relation avec la Ligue Internationale pour l’Éducation Nouvelle. Il voyage en Europe pour assister et participer à des conférences sur ce thème. Il avait entendu parler de l’institut Tchèque de Frantisek Bakule destiné aux enfants handicapés, qui obtenait d’incroyables résultats grâce à sa pédagogie toute particulière. Il fera venir ce dernier en France pour qu’il présente son travail ainsi que la pédagogue Lida Durkidova qui deviendra en 1933 l’épouse de Paul Faucher. Il se déplace régulièrement entre Paris et Prague, où il découvrira l’institut ainsi que des albums tchèques pour enfants. De fil en aiguille, de rencontres en discussions et grâce à sa femme, il se lie d’amitié avec plusieurs artistes, dont Joseph Lada, peintre-illustrateur et Feodor Rojankovsky dit Rojan (illustration).

Il décide alors de mettre en application ses convictions concernant la nouvelle pédagogie en lançant en 1931, les premiers albums de la Collection du Père Castor.

Pourquoi ce nom ‘Père Castor’ ?

« C’est parce qu’ils apportent des jeux constructifs aux enfants que ces albums furent placés sous le signe d’un animal voué d’instinct à la construction : le castor », expliquait Paul Faucher au sujet de la collection du Père Castor.

Les débuts…

La collection privilégie d’abord des albums qui s’appuient sur des activités manuelles et constructives. Les deux premiers albums publiés en 1931 sont des livres-jeux illustrés par Nathalie Parain,

– « Je fais mes masques » > Huit masques à découper représentant les visages du monde : Hindou, Japonais, Arabe, paysan Normand, paysan Russe, Africain, Peau-Rouge, Esquimau. Des conseils en début d’ouvrage expliquent comment procéder pour les réaliser.

– « Je découpe » .

Consécration des Albums du Père Castor

En février 2018 , l’ensemble de la collection des Albums du Père Castor est classée au patrimoine culturel inscrit dans le registre « Mémoire du monde » de l’UNESCO. Avant son décès et pendant de nombreuses années, François Faucher, fils de Paul Faucher, a tenté de persuader l’UNESCO de la portée du travail de son père et de son succès au regard des 16 millions d’exemplaires diffusés et traduits dans le monde entier. C’est le premier fonds d’éditeur reconnu d’intérêt mondial.


Médiatèque du Père Castor

Cette médiathèque située à Meuzac* en Haute-Vienne, conserve toutes les premières éditions, les dessins originaux, une photothèque et des enregistrements audio & vidéo des interventions de Paul & François Faucher.

*Village où Paul Faucher possédait une maison de campagne

Bibliothèque "L'heure Joyeuse"

Le lien entre Pierre Belvès et Paul Faucher

Pierre Belvès, adolescent et vivant à Paris, passe de nombreuses heures à la Bibliothèque de « L’Heure Joyeuse « située non loin de la Sorbonne. Cette bibliothèque destinée à l’enfance et la jeunesse par le choix de ses livres est d’un autre genre comparée à celles de l’époque : on pouvait parler, discuter de ses lectures, entendre lire à haute voix.

C’est ici que Paul Faucher, adulte déjà bien engagé dans la vie, rencontre Pierre Belvès.

Paul Faucher était intéressé par tout ce qui touchait l’Education Nouvelle . Il voyageait en Europe pour assister et animer des conférences sur ce thème.

Paul Faucher a repéré Pierre et l’encourageait dans son parcours artistique. Il lui a même organisé une petite exposition de ses tableaux dans la bibliothèque de « L’Heure Joyeuse ». Depuis lors, ils ont entretenu une amitié qui s’est poursuivie et a été décisive dans toute la carrière de Pierre Belvès.

* offerte par les Américains après la Grande Guerre

Pierre Belvès, un des illustrateurs phare des Albums du Père Castor

En créant la collection Les Albums du Père Castor, Paul Faucher a bien entendu fait appel au talent de Pierre pour illustrer plus de 70 albums dont le fameux Roule-Galette !

Mais Paul Faucher fit plus que cela.

Il lui fit rencontrer le Comte Philipon, un mécène d’âge mur veuf et sans enfant, qui souhaitait aider les jeunes talents dans leur parcours.

Pierre avait réussi le concours d’entrée de l’école nationale supérieure des Arts Décoratifs de la rue d’Ulm, où il y sera formé pendant 4 ans et obtiendra le diplôme. Ce genre d’école est gratuite mais nécessite d’acheter beaucoup de matériel (peinture, toile,…). Ainsi, le Comte Philipon participa largement au financement des études de Pierre. Il lui permit aussi de voyager à travers l’Europe pour qu’il s’imprègne des paysages de France et des beaux arts des pays d’Europe.

Après avoir suivi l’école des Arts Décoratifs, Pierre passe avec succès le professorat de ‘Dessin’ de la Ville de Paris et des lycées, et devient professeur de dessin.

Dans les années 1930, Pierre Belvès va enseigner dans le grand Lycée du Parc à Lyon. Il y rencontre un autre enseignant d’un autre collège, Eugène Claudius Petit, qui deviendra son grand ami. Ce dernier lui permettra, après la guerre, de revenir sur Paris, ville tant aimée de Pierre.

Pierre va donc continuer d’illustrer des Albums du Père Castor tout en enseignant les arts plastiques (autrefois appelés cours de dessins) dans divers établissements. Il va aussi illustrer des guides de voyages commandés par la maison d’édition Odé…

Pierre Belvès profitera des périodes de vacances scolaires pour voyager et reviendra régulièrement sur Issigeac. Paul Faucher, parisien, aime à se retrouver en campagne dans le limousin à Meuzac (Fourjeneuve). Les deux hommes s’y retrouveront avec d’autres amis et lanceront de grandes discussions autour de l’éducation de la Jeunesse, des mouvements Montessori et Steiner.

Le Style Pierre Belvès, illustrateur – pédagogue

ierre n’a jamais oublié sa campagne natale, Issigeac en Dordogne. Nombreux sont ses dessins évoquant la nature, la faune, la flore champêtre. Son style inimitable est chargé des multiples couleurs de la végétation, des espaces qu’il a pu voir enfant.

Pierre Belvès a pu voyager tout au long de sa vie, ce qui lui a permis de forger son œil, de démultiplier ses palettes de couleurs. En répondant à des commandes de maisons d’édition, il profitait à la fois d’un voyage mais surtout nourrissait son cerveau d’images, de couleurs, d’impressions (Terre Sainte, Espagne, Provence, Autriche, Allemagne…).

Tout cette passion, il a pu la retranscrire dans ses textes et lors des ateliers qu’il animait auprès des enfants, en particulier lors des séances des « Ateliers de moins de 15 ans »*.

Les différentes réalisations :

  • Les contes illustrés : Roule-Galette, Petit Poissons d’Or, Pauv’Coco…

A partir d’un texte écrit par un auteur, Pierre illustrait avec soin et à sa manière certaines étapes de l’histoire toujours en pensant au futur lecteur.

  • Les livres-jeux ou livres d’activité (découpage, coloriage, pliage…).

Toutes sortes de travaux étaient proposés aux enfants par tranche d’âge. Ainsi pour les plus grands un cahier complet livre + matériel autour de la linogravure leur permettait d’aborder cette technique.

Ici Pierre Belvès réalisait à la fois les textes et les illustrations.

En relation avec les saisons ou avec les fêtes chrétiennes, des livrets proposent la réalisation d’une crèche, d’une couronne des rois, de coloriages d’œufs de Pâques…

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